Cela faisait un moment que j’avais envie de visiter Albi, au coeur du Tarn, et heureusement en décembre j’ai pu profiter d’un autre déplacement à Montauban pour y aller. Elle est seulement à environ une heure en voiture ou en train de Toulouse. Sur place, je vous conseille bien sûr de réserver votre premier stop à l’Office du Tourisme, pour récupérer un plan gratuit, ou peut-être vous procurer une carte « Albi city pass » qui coûte 14 €, valable toute l’année : il permet de bénéficier de tarifs réduits dans 30 musées ou activités de visites ou de loisirs. Pour se la procurer ou voir les détails de l’offre, il suffit de cliquer ici.
Office du Tourisme d’Albi – 42 rue Mariès – ouvert du lundi au samedi de 10 h à 18 h
La ville d’Albi est surtout connue pour sa cathédrale Sainte Cécile, qui est vraiment imposante, il faut en faire le tour de l’extérieur avant d’y entrer, pour saisir la dimension de l’édifice … c’est en effet la plus grande cathédrale de brique au monde. Elle est bien différente d’autres cathédrales gothiques connues comme Chartres, Reims ou Amiens. On voit au premier coup d’oeil son allure défensive et austère, à travers ce style gothique méridional. Si vous voulez des chiffres, qui vous parleront peut-être davantage … les voici ! 113 mètres de long, 35 mètres de large et un clocher de 78 mètres de haut …
A l’intérieur, on reste bouche bée devant la richesse du décor, en particulier le plafond … les superlatifs manquent parfois, mais en voilà un : c’est la cathédrale peinte la plus grande d’Europe ! La voûte est recouverte de motifs de style Renaissance italienne sur fond de bleu profond, qui ont mis trois ans à être réalisés, entre 1509 et 1512.
Une barrière de dentelle blanche sépare la cathédrale en deux parties (voir ci-dessous) : la nef et le choeur. (l’accès au grand Choeur est payant). Sous le grand orgue, observez les dessins étalés sur plus de 200 m² de surface : le Ciel, la Terre, l’Enfer sont mis en scène pour représenter le Jugement Dernier. En partie basse, on reconnaît la représentation des sept péchés capitaux. Avec une telle collection de peintures, sculptures … il n’est pas étonnant que cette cathédrale attire plus de 800 000 visiteurs chaque année.
Cathédrale Sainte-Cécile – entrée libre sauf Grand Choeur (5 €) – ouvert tous les jours (dimanche matin réservé à la Messe)
A côté de la cathédrale, vous remarquerez un ensemble de bâtiments également imposants, il s’agit du palais épiscopal. Ancienne résidence des évêques d’Albi, c’est une forteresse d’origine médiévale, aux épais murs de briques. Elle s’organise autour d’une cour d’honneur et d’un donjon. Bien sûr, au cours des siècles, les différents prélats l’ont modifiée, agrandie et embellie, et le département et la ville d’Albi continuent à investir afin de le restaurer et de le valoriser. C’est maintenant la propriété du conseil départemental.
Réalisée avec Patrice Calvel, architecte en chef des monuments historiques, la mise en valeur de l’ancienne forteresse des seigneurs et évêques d’Albi, classée en 2010 au patrimoine de l’Unesco avec la cathédrale Sainte-Cécile, est une vraie réussite. L’entrée du musée qui se faisait, hier, sur la rue, a été déplacée dans la cour d’honneur pavée, qui a été excavée de 17 mètres pour loger un auditorium. C’est là que je me dirige pour une petite découverte des oeuvres du peintre.
Le palais accueille donc depuis 1922 les oeuvres de Toulouse-Lautrec, et grâce à la généreuse donation de sa famille, Albi, sa ville natale, conserve la plus riche collection au monde consacrée à l’artiste.
Cette collection représente le parcours principal du musée (c’est le parcours ocre jaune) ; dans la première salle, il est émouvant de découvrir des photographies de l’artiste, qui était de très petite taille (1,52 m) car il avait une maladie affectant sa croissance (en raison de la consanguinité de ses parents). Ainsi, il marchait avec une canne, car ses os fragiles ont eu du mal à se ressouder après des fractures. En raison de différents excès pendant sa vie (alcool entre autres), il décède à 36 ans en 1930.
Si les oeuvres présentées sont très belles, (dessins, peintures), … tout le plaisir est gâché à mon avis par les vitres posées sur celles-ci. L’éclairage cause des reflets vraiment très gênants, et je ne parle pas seulement de photographie, c’est gênant aussi pour admirer les tableaux. Quel dommage.
Un autre parcours (repéré avec la couleur rouge) permet de découvrir la collection « Art ancien », avec de très belle oeuvres de Francesco Guardi, Georges de la Tour (deux toiles), Hyacinthe Rigaud … Il a en fait été constitué à la fin du XIXe siècle, bien avant d’accueillir les dessins de Toulouse-Lautrec. Elles se trouvent dans le Salon Doré et la Salle de la Croix, qui sont magnifiques ; elles ont été décorées (poutres du plafond) par le peintre Roland Couplet et datent du XVIIe siècle.
On a une très belle vue sur les jardins et le Tarn depuis les salles … l’accès à ces jardins est d’ailleurs gratuits, il faut, lorsque vous entrez dans la cité épiscopale, prendre sur la gauche pour vous y promener gratuitement.
Au niveau 2, c’est la « collection d’Art Moderne » qui est exposée, (parcours bleu) avec des tableaux de Paul Gauguin, Edgard Degas, Pierre Bonnard, ainsi que des sculptures de Bourdelle, entre autres. J’ai beaucoup aimé cette partie, car les salles sont plus lumineuses et les oeuvres ne sont pas sous des vitres !!
En parcourant les différentes salles, ou découvre les pavements gothiques, et certains fastueux plafonds aux décours Renaissance, comme cette Galerie d’Amboise, révélée au cours de travaux de chantier en 2011.
C’est un magnifique décor peint du XVe siècle qui s’offre à nos yeux, après restauration.
Autre merveille architecturale, l’escalier d’honneur, commandé par l’évêque Daillon du Lude.
Au dessus de l’escalier, la voûte du plafond a été restaurée en 2011. Commandée par l’évêque italien Hyacinte Serroni au XVIIe siècle, elle illustre les quatre vertus cardinales : la prudence et son miroir, la tempérance et ses deux réceptacles, la force terrassant l’animal, et la justice tenant la balance. Ces fresques ont été inspirées de celles du dôme de San Carlo ai Catinari à Rome, et sont attribuées à Dominiquin, un peintre italien du mouvement baroque.
Musée Toulouse-Lautrec – Palais de la Berbie – place Sainte-Cécile – horaires suivant saison
Après cette visite incontournable, je suis allée voir la halle du marché couvert, un pavillon de style Baltard qu’on ne peut louper ! Construit en 1903, il accueille désormais plusieurs commerces de bouche (même un restaurant a sa petite terrasse devant l’entrée, comme vous pouvez le voir). Il y a même une supérette en sous-sol.
Mais ce que j’ai préféré ce jour-là, c’est me promener le nez en l’air dans les rues de l’ancienne ville pour découvrir les différents hôtels de l’époque Renaissance .
Munie de mon plan, je pénètre dans la cour intérieure de l’hôtel Reynès, pour admirer l’heureux mariage entre la pierre et la brique. C’est une riche famille ayant fait fortune dans le commerce du pastel qui l’a fait construire vers 1525. On remarque les portraits de François 1er et Eléonore d’Autriche sa première femme sous une fenêtre : en effet, le couple aurait été attendu (en vain) dans la ville d’Albi en 1533 … cet ajout daterait donc du XVIe siècle.
Non loin, l’hôtel de ville s’appelait auparavant l’hôtel Saint-Hyppolite ou « de Martin ». C’était, d’après les archives que l’on a pu retrouver, l’hôtel particulier du trésorier de France, Monsieur de Martin. Y siégeaient les consuls, dans ce qu’ils appelaient « la maison commune », jusqu’en 1388. Plus tard, il a abrité un dépôt de mendicité, créé par Madame Antoinette de Lebrun ; il est classé Monument Historique depuis 1971 et c’est aujourd’hui le siège principal de la Mairie d’Albi.
Le plafond du bureau du Maire est de toute beauté, … hélas, on n’y rentre pas comme ça ! Je me suis contentée de la cour intérieure.
Hôtel de Ville – 16 rue de l’Hôtel de Ville
Le plus spectaculaire est sans aucun doute la maison Enjalbert , à l’angle de la rue des Pénitents et de la rue Timbal. Cette grande maison à colombages a toute la panoplie des décors Renaissance : fenêtres d’angle double avec pilastres surmontés de chapiteaux ioniques ou corinthiens, les frontons triangulaires, les consoles aux décors portant des masques, des losanges…sont repris.
Maison Enjalbert – angle rue des Pénitents et rue Timbal (ne se visite pas)
Rue de l’hôtel de ville, voici l’hôtel de Saunal, qui était la propriété d’un marchand enrichi par le commerce du pastel, Simon Saunal. Mais au fait, c’est quoi le pastel ? C’est une plante à fleurs jaunes, très utilisée au XVe siècle pour la teinture du textile (son nom scientifique est Isatis tinctoria). Celle-ci est connue depuis l’Antiquité, mais on n’a commencé à l’utiliser pour la teinture qu’à partir du moyen-âge. Ce sont en réalité les feuilles et pas la fleur qui ont les propriétés de teinture d’un bleu indélébile ; il faut les broyer, les faire fermenter et les préparer et former une coque avant de les commercialiser. En tout c’est un cycle qui dure environ quatre ans, du semis à l’utilisation. Les terres de la région albigeoise se prêtent très bien à cette culture, ce qui expliquera cette prospérité de commerce de l' »or bleu », entre 1460 et 1560. Avec l’arrivée de l’indigo, plus riche en colorant et plus facile à produire, le pastel voit sa popularité diminuer.
On distingue la tour en échauguette qui domine les toits, derrière la demeure de brique aux portes en arcs bordées de pierre, et à l’intérieur un musée a pris place, où sont exposées des peintures de l’artiste Raphaël Cordoba (sa fille vit dans ce lieu magnifique). Un musée pour tous 38 rue de l’Hôtel de Ville : visites sur rendez-vous uniquement (5 €)
La maison du vieil Alby est une maison médiévale typique à pans de bois, du style albigeois du XIIe siècle ; au rez-de-chaussée se trouvait l' »obrador » où l’artisan exposait et vendait sa production. Il vivait au premier étage. On distingue une espèce de terrasse au dernier étage : c’est le « soleillou », où le linge ou les produits agricoles séchaient. Cette habitation a été restaurée dans les années 1970, tout en sauvegardant ses éléments d’origine. A l’époque de mon passage il n’était pas possible de visiter l’intérieur de cette demeure, vérifiez avant de vous déplacer, les visites auront peut-être repris ?
L’ Hôtel Fenasse était un hôtel particulier de style roman, en observant sa façade où se mêlent la pierre et les briques, on devine facilement qu’il y a eu pas mal de remaniements au cours des siècles … la construction d’origine date du XIIe siècle, et appartenait à la riche famille albigeoise Fenasse puissants marchands et financiers. Accusés de catharisme, la maison leur fut confisquée et devint d’abord la propriété d’une famille d’évêques, la demeure seigneuriale des vicomtes d’Albi, puis d’un sénéchal de Toulouse et enfin celle d’un riche négociant albigeois Etienne Lacombe en 1791.
Hôtel Fenasse – angle du 1 rue des Foissants et de la rue Saint-Étienne (ne se visite pas)
Pour continuer ma promenade, j’ai quitté le centre ville et traversé le Pont Neuf … pour avoir une belle vue d’ensemble de la cité d’Albi, et du Pont Vieux ! Déjà au XIIe siècle (il aurait été construit en 1060), Albi était un carrefour important sur les routes entre méditerranée et océan, mais aussi sur d’autres routes comme celle allant de la Catalogne à Paris. Ce pont, point de passage obligé, faisait l’objet du paiement d’un péage, à une époque où les foires et marchés jouaient un rôle de première importance. On a même retrouvé une grille tarifaire détaillée datant de 1245, qui répertoriait 200 articles : denrées alimentaires, produits finis, ustensiles, charbon de Carmaux et pastel … Au Moyen-Âge, en contrebas du pont se trouvait le « Port Vielh », puisque pas mal de commerce fluvial passait sur le Tarn, grâce à des bateaux qu’on appelait des « gabarres » ; on peut toujours faire des croisières sur des bateaux leur ressemblant, grâce à Albi croisières.
Depuis ce pont, outre la vue sur le Tarn, sur l’autre rive, on voit le « quartier du bout du pont » ou « quartier de la Madeleine » … où se trouvaient les miséreux et les exclus ; on distingue sur ma photo, au fond, le clocher de l’église de la Madeleine, que je n’ai pas eu hélas le temps de visiter. C’est là que se trouvaient les moulins, les tanneries, briqueteries …
Je reviendrai ensuite sur la rive gauche par le Pont Vieux, et grimperai la Rue de la Grande Côte, qui porte bien son nom, car elle grimpe ! C’est là qu’habitaient les riches marchands et banquiers d’Albi. Elle a conservé une partie de ses demeures, d’ailleurs classées à la liste des Monuments Historiques, (aux numéros 1 -vieil hôtel Delecouls- et 8).
En fin d’après-midi, je pousse la porte de la collégiale Saint-Salvi, qui tient son nom du premier évêque de la ville d’Albi …. elle se dresse à l’angle de la place Sainte-Cécile depuis le XIe siècle, c’est d’ailleurs l’une des plus grandes églises romanes de la région. On remarque le mélange de matériaux, pierre et briques, utilisés pour sa construction ; en effet vers le XIIIe siècle il y a eu un changement d’utilisation de ceux-ci.
Ne loupez pas à l’intérieur, cet ensemble de sculptures en bois polychrome grandeur nature, qui date de la fin du moyen-âge. Les personnages sont disposés de part et d’autre du Christ, reproduisant un épisode de la Passion et cette oeuvre est classé aux Monuments Historiques depuis 1965.
Mitoyen à la collégiale, le cloître Saint-Salvi, construit en 1270, est un lieu calme et serein comme je les aime. Les arcades romanes sont associées à des chapiteaux gothiques sculptés de personnages, d’animaux ou de végétation. Au centre a été reproduit un jardin d’herbes médicinales et aromatiques, identique à celui de l’époque, probablement.
Collégiale Saint-Salvi – rue Maries – ouvert du lundi au vendredi de 7 h 45 à 12 h, le samedi de 14 h à 17 h 30, le dimanche de 8 h 30 à 12 h.
Cloître : ouvert de 7 h à 20 h (entrée libre)
Le Musée de la Mode est petit mais les vêtements et accessoires qu’il renferme est vraiment magnifique. C’est grâce à Dominique Miraille, collectionneur passionné par les costumes anciens, que nous pouvons admirer ces pièces uniques.
Ce musée se trouve en plein coeur du Vieil Alby, tout près de la cathédrale, dans une partie de l’ancien couvent des Annonciades, plusieurs fois remanié depuis son édification datant du début du XIIe siècle. La visite permet d’en découvrir quelques éléments : un escalier à vis, des portes gothiques, une cave voûtée … ne loupez pas cette exploration de robes, costumes, gilets … allant du XVIIIe au années 2000, soigneusement sélectionnées.
J’ai eu la chance de voir, lors des derniers jours d’exposition, la collection dédiée au thème de la broderie, et j’en suis repartie avec des étoiles dans les yeux !
Musée de la mode – 17 rue de la Souque – Ouvert du mardi au dimanche de 9 h 30 à 12 h et de 14 h 30 à 18 h – Tarif adulte : 6 €
Où manger ?
Au hibou est à la fois un bar, un café …. et un restaurant. Repéré dans mon guide Michelin et récemment repris par Loïc et Jennifer Benech, je n’ai pas regretté d’avoir réservé ma table car j’ai pu voir qu’ils refusaient pas mal de monde à l’heure du déjeuner. C’est un excellent rapport qualité prix, proposant une formule très intéressante à midi :
N’hésitez pas à vous y arrêter pour y prendre le petit-déjeuner, ou déguster l’une des nombreuses bières artisanales de la carte, ou leurs vins bio. Un petit arrêt pour voir la galerie d’art au deuxième étage est aussi une bonne idée !
Je me suis régalée de ces aiguillettes de canard avec une purée de panais et des carottes glacées (avec quelques chips de panais), puis un délicieux gâteau aux noix.
Au hibou – 21 rue Saint-Julien – (ouvert de 7 h 30 à 18 h – fermé le mercredi)
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