Street art à Dubaï

Si on vient surtout à Dubai pour grimper à un étage élevé de la tour Burj Khalifa ou voir le spectacle des fontaines, ou faire du shopping, il y a pas mal de points d’intérêt pour les amateurs de street art dans la ville. Point de fresques sauvages ou de graffiti aux Emirats Arabes Unis, où le vandalisme est sévèrement réprimé, et les bombes de peinture spray vendues à un prix très élevé. On ne trouvera donc dans le pays que des oeuvres commissionnées, ce dont on peut se féliciter tout de même. Profitant de mon voyage dans la capitale, j’ai pu voir plusieurs quartiers où trouver du street art à Dubai.

La marque « Brand Dubai » a fait un travail énorme pour faire de Dubai une ville de premier plan à ce niveau, en faisant venir des artistes du monde entier, et bien sûr aussi d’autres des E.A.U. ou du Moyen Orient. Avec le soutien de la municipalité, différents projets ont été menés, dans plusieurs quartiers, que nous allons détailler ci-dessous. Alors n’oubliez pas votre appareil photo pour capturer ces vibrants dessins, mettant en avant l’histoire de Dubai mais aussi sa modernité.

Sur 2nd december street

Cette rue s’appelait avant « Al Diyafah Street », mais elle a été renommée en hommage au jour de signature de la création des Emirats Arabes Unis, le 2 décembre 1971. C’est devenu le repère de plusieurs artistes, opérant dans le cadre de l’opération « Dubai Street Museum » dans le quartier de Satwa. Le but était de rendre hommage à l’héritage et aux traditions, à l’histoire émirati, comme vous pouvez le voir sur les photos ci-dessous, le thème a bien été respecté par les artistes invités. Au total les façades de seize bâtiments ont été peints, grâce aussi à Rom Levy et Sanaz Askari, les curateurs de ce projet. Ce quartier cosmopolite était habité il y a très longtemps par les bédouins, et c’est maintenant la classe ouvrière qui vit ici, dont beaucoup de travailleurs philippins, qui sont employés par des familles de l’émirat, ou qui sont employés sur des chantiers. Ce quartier qu’on surnomme « le petit Manille » est animé, avec de nombreux restaurants et boutiques qui ferment très tard la nuit.

Au niveau d’un rond point très fréquenté, on tombe tout d’abord sur cette composition murale de Julia Volchkova représentant un homme dans son abra, un bateau étroit sculpté dans le bois traditionnellement utilisé pour les voyages et le commerce. Si vous allez dans le vieux Dubaï vous pourrez en emprunter une pour traverser le creek, ce bras de mer qui sépare les deux rives. Je ne connaissais pas cette artiste originaire de Sibérie et a étudié le dessin depuis son plus jeune âge ; une fois diplômée, elle a commencé à s’adonner au graffiti dans la rue … elle a même réalisé d’immenses fresques à Peneng en Malaisie.

Andreas von Chrzanowski aka Case Maclaim a peint ces mains tenant une cafetière typique de la région, la « dallah », représentant ainsi un rappel de la tradition du café arabe. Cet artiste allemand natif de Francfort nous séduit toujours avec ses gros plans de mains, j’avais pu voir son travail à Heidelberg et il est venu récemment à Boulogne-sur-Mer.

La muraliste Ashwaq Abdulla a choisi de rendre hommage aux fondateurs de l’état, dans cette fresque représentant les cheikhs Rached Al Maktoum and Zayed Al Nahyane. Soyez attentifs car cette fresque est dans une rue perpendiculaire à 2nd december street, il est facile de la louper. J’ai trouvé peu d’informations sur cette artiste qui est basée à Abu Dhabi, non loin de Dubai.

Vous reconnaissez sûrement l’oiseau emblème des Emirats Arabes Unis, le faucon, symbole de force et de courage, ici peint en 2016 par Hua Tunan, un artiste né en Chine et dont le style me fait un peu penser à Satr. Il est imposant sur les quatre étages de cet immeuble d’habitations.

Enfin, j’étais ravie de revoir les dessins rafraîchissants et pleins de vie d’Ernest Zacharevic, dont j’avais gardé un excellent souvenir, après mon passage à Ipoh en Malaisie. Cet artiste lituanien basé à Penang dans ce pays a vraiment beaucoup de talent, il a su vraiment capturer ces enfants en plein mouvement !

Avantages : Des fresques monumentales par des artistes locaux et internationaux

Inconvénients : Un peu distantes les unes des autres, mais faisable à pied tout de même

A City Walk

Nous voici plus près du centre ville, dans cette zone commerciale mi-couverte mi en plein air, avec ici et là des fresques de grands noms du street art. Dommage que le dessin de Ron English a disparu, j’aime beaucoup cet artiste aux oeuvres assez dérangeantes … Dans le cadre de DUBAI WALLS , ils ont été plusieurs à avoir été invités et tant mieux ! (sur le site Dubai Walls se trouve une carte des oeuvres à voir à City Walk, bien utile)

Cocorico, j’ai trouvé là-bas deux dessins au pochoir du français Blek le Rat, il y en a peut-être d’autres qui m’ont échappé … considéré comme le parrain du street art moderne, il a peut-être inspiré Banksy …

Un peu discrètes car situées en hauteur, les dessins façon comics de Dean Stockton (D*Face) ne sont pas tellement mises en valeur. Ne loupez pas sa fresque à Bushwick à Brooklyn.

 

L’oeuvre de Beau Stanton (mars 2016) est en fait double ; déplacez-vous de gauche et de droite pour découvrir les deux portraits bien différents, et aussi profiter pour l’une d’elles de la vue sur la tour Burj Khalifa. Le mur n’est pas plat, mais l’artiste a su remarquablement en tirer parti. Sur ces blocs anguleux, il a peint une espèce d’anamorphose, un vrai régal pour les yeux ! L’américain parcourt le monde car il est très demandé, comme par exemple au Danemark, à Aalborg, où il a réalisé une mosaïque.

Je suis sûre que vous connaissez VHILS, artiste à part dans la scène street art, qui réalise ses portraits au burin et au marteau-piqueur.

Les personnages rigolos de The London Police ornent une des façades du McDonald’s du City Walk

Avantages : de très belles fresques et un lieu très facile à explorer à pied, mais attention il faut quand même une bonne vingtaine de minutes de marche depuis la station de métro Burj Khalifa. On peut en profiter pour visiter (comme nous l’avons fait) le « Green Planet », une forêt tropicale dans un biodôme.

Inconvénients : je n’en vois guère

A La Mer

Si l’endroit est plutôt agréable, en bord de mer (dans le quartier de Jumeirah 1), n’ayez pas trop d’attentes côté artistique. Les jolis dessins que vous trouverez un peu partout sont inspirés d’oeuvres d’artistes, mais ont été réalisés par une agence. Cela égaye les bâtiments successifs de boutiques, cafés et restaurants, et rend la promenade très plaisante en famille. Nous y avons d’ailleurs dîné deux fois ; attention par contre, il est assez difficile de s’y garer, à moins de prendre un voiturier (« valet parking »), ou sinon vous éloigner un peu et vous garer dans les rues à proximité.

Avantages : Environnement agréable entre plage, boutiques et restaurants

Inconvénients : Pas de créations d’artistes mais des peintures « inspirées de » réalisées par une agence artistique, 4MAAT.

Sur The Walk à La Marina

Si je trouve la Marina bien plus magique la nuit, je vous conseille d’aller sur « The Walk », courte promenade le long des « JBR » (JUMEIRAH BEACH RESIDENCES) pendant la journée. Vous pourrez voir quelques fresques intéressantes, dont certaines ont été réalisées pendant le Dubai Canvas en 2017. Le thème était plutôt la représentation en trois dimensions cette année-là, mais je crois que d’autres sont plus récentes.

Devant l’Ocean View Hotel, l’artiste anglais Dotmaster a peint avec beaucoup d’humour ces sacs poubelles, mêlés à des sacs de marques de luxe. Actif depuis les années 90 dans la ville de Brighton, il a joué un rôle très important dans l’organisation du festival NuArt en Norvège.

J’aime beaucoup cette oeuvre d’Eduardo Kobra, avec des chevaux (si vous allez à Abu Dhabi, il en a peint une autre qui est vraiment chouette). Plusieurs oeuvres sont réalisées sur des escaliers menant aux blocs de résidence.

Je vous laisse découvrir les autres fresques, peintes par Fanakapan (Londres), Juandrés Vera (Mexique), Leon Keer (Pays-Bas) ….

Avantages : des fresques originales et une promenade pas trop longue (1,7 km) – accessible en métro via les stations JLT ou DAMAC, ou le tram stations JBR1 ou JBR2.

Inconvénients : aucun

Sur Jumeirah Beach Road

C’est là aussi grâce à Rom Lévy, curateur de nombreux festivals de street art, que l’on doit la présence de fabuleux artistes sur Jumeirah Beach Road. Le projet du Dubai Street Museum en est déjà à sa quatrième phase, transformant Dubai en ville sur laquelle il faut compter pour représenter l’art urbain, par des oeuvres d’artistes venus du monde entier. La première était sur 2nd december street, la deuxième à Hatta, la troisième sur les piliers du métro.

Ampparito est venu de Madrid en Espagne en 2019 réaliser ces deux fresques, l’une représente un hameçon vraiment réaliste, et l’autre une cassette … j’adore ces deux fresques, pourtant très différentes ! Cet artiste aime représenter des objets simples et ordinaires, mais parfois à une échelle inhabituelle qui les rend singuliers tout à coup. A Londres il a par exemple peint d’énormes interrupteurs sur le toit d’un immeuble à Peckham … ou un autre hameçon sur Hanbury Street (vers Brick Lane)

Daniel Cortez Torres (Pérou) a.k.a. Decertor , a représenté un enfant jouant aux billes sur ce pan de mur étroit d’une galerie d’art islamique. J’aime les détails des plis de son vêtement, la tenue traditionnelle des Emirati, la kandoura. Il n’a pas suivi de formation en arts plastiques, mais s’est intéressé au graffiti grâce au mouvement hip hop à Lima. Ce dessin est assez sobre par rapport à ce qu’il peint d’habitude, souvent avec des couleurs très vives.

Né à Al Ain pas très loin d’Abu Dhabi, Saggaf Alhashmi est un artiste autodidacte qui est très attaché aux traditions de son pays. Son nom d’artiste est tout simplement Saggaf ; sa fresque représente ici un vieil homme, un pêcheur et son filet … je n’ai pas trop compris pourquoi il avait une espèce de hameçon dans le nez.

La plage n’est pas loin, aussi Apolo Torres a choisi de peindre en 2018 quelques bouées de couleurs vives … désolée la qualité de ma photo n’est pas au top … prise depuis la voiture en train de rouler ! Installé à São Paulo, il a étudié à la Visual School of Arts de New York, il est très actif dans la rue mais aussi en galerie. Il maîtrise la peinture classique, contemporaine, et il peint au Brésil, en Italie ou aux Etats-Unis, participant aussi à quelques festivals.

A gauche ci-dessous, une petite fille dessine des fenêtres sur un mur jaune … une peinture poétique et qui nous laisse voir dans celles déjà terminées un paysage des Emirats Arabes Unis. Saeed Aboud n’est pas très connue sur la scène internationale, mais cet artiste le mériterait.

Evoca1 est né en République Dominicaine, mais il a choisi de vivre dans le sud de la Floride. J’aime beaucoup cette scène qu’il a peinte, représentant un enfant Emirati et son cerf-volant, sur la plage. Il aime s’adonner aussi à la sculpture, avec beaucoup de talent.

Avantages : des artistes des EAU et aussi internationaux

Inconvénients : impossible à explorer à pied, la route est vraiment très longue et les oeuvres éloignées les unes des autres, pas facile de s’arrêter souvent en voiture … peut-être plus aisé en vélo ? (il y a une file)

et aussi ….

• Sur les piliers soutenant la ligne rouge (Red Line) du métro aérien, sur Sheikh Zayed Road, entre les stations Financial Center et Emirates Towers. Parmi les artistes : Daniel Cortez (Pérou), Evoca1 (République Dominicaine, basé à Miami).

• Sur la rue 18B (vers le Karama Shopping Complex) dans le quartier Al Karama : un aperçu à voir dans l’article du blog kathmanduandbeyond : https://www.kathmanduandbeyond.com/dubai-street-art-karama/ . De très belles fresques à découvrir, mais cela se trouve tout de même à un quart d’heure de marche de la station de métro « ADCB » donc je vous conseille plutôt d’y aller en taxi.