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Dans la chocolaterie

Pénétrer dans un atelier de chocolat c’était un rêve depuis longtemps, et ce rêve s’est réalisé il y a peu …

C’est en effet à la Croix-Rousse, à Lyon, que j’ai pu assister à la fabrication de quelques spécialités, avec les explications précieuses de Jacques et Denis, de la chocolaterie « La Toque Blanche« .

escarpin chocolat

Dans la vitrine, de magnifiques escarpins en chocolat suscitent l’admiration des passants … je me demande s’ils ont ma taille ? 😉

tablette chocolat

A l’intérieur, outre les chocolats, on découvre toute la confiserie : orange, cédrat, citron, clémentines …

fruits confits

 

Le cacao

Mais commençons par le commencement … le cacao bien sûr !

La cabosse est le fruit du cacaoyer, un arbre qu’on trouve principalement en Afrique et en Amérique Latine. Trois variétés existent : les Criollo, les Forastero, et les Trinitario. A l’intérieur de cette cabosse, on trouve des graines enveloppées dans de la pulpe, ce sont les fèves de cacao. Sur les lieux de récolte, on va les ouvrir et on va faire une fermentation de ces graines, qui va développer l’arôme de ces futures fèves de cacao, et faire disparaître la peau blanche qui les entoure ; c’est une phase très importante. Ensuite on va les faire sécher et elles seront expédiées dans les différents pays, où des spécialistes vont faire un assemblage de différents « crus » et les torréfier, puis les écraser. On va obtenir une pâte de cacao, dont on va conserver une partie, et on va presser l’autre partie. En la pressant, on va obtenir d’un côté un « tourteau de cacao sec », et d’un autre côté on va récupérer du beurre de cacao. Pour fabriquer le chocolat, on va mélanger la masse de cacao, ajouter du beurre de cacao et du sucre. Ces mélanges varient selon qu’on veut obtenir du chocolat noir, ou au lait. Le chocolat blanc, lui, n’est fait qu’avec du beurre de cacao (pas de masse de cacao), du lait et du sucre.

chocolaterie la toque blanche lyon

Voici le résultat : un chocolat brillant et croquant. Pour lui garder ces qualités lorsqu’on l’utilise, il va falloir respecter quelques règles importantes : il faudra « mettre le chocolat au point » (lui faire subir une courbe de cristallisation). Pour cela on va le faire fondre à une température entre 47° et 50°, pour que le beurre de cacao se mélange bien avec la masse ; ensuite on va le redescendre à 26° puis le remonter à maximum 33° (pour le chocolat noir) ou 31-32° (pour le chocolat blanc ou au lait) et là on pourra travailler le chocolat et il redeviendra brillant et croquant. A la maison, on peut essayer de faire fondre le chocolat au bain-marie, ou d’utiliser le micro-ondes, en brassant souvent et en surveillant.

Le chocolat ci-dessous est fait avec 5 variétés de fèves différentes, il est plutôt utilisé comme chocolat d’enrobage ; pour faire des tablettes ou une ganache au goût spécifique, on utilisera du chocolat avec des qualités plus spécifiques.

tablette chocolat maxi 5 kgs

 

Les toques blanches

Spécialité lyonnaise, la toque blanche est un bonbon au chocolat enrobé de pâte d’amande, puis cristallisé pour un beau brillant. Son nom vient de celui de l’association « Les Toques Blanches lyonnaises », que vous connaissez peut-être.

Tout commence par la ganache, un mélange de chocolat noir, de chocolat au lait, de caramel, et de Grand Marnier (alcool parfumé à l’orange). Le mélange est fait à chaud, et on peut y rajouter un peu d’eau si la pâte est trop dure. On s’en sert ensuite comme une pâte à modeler, l’étaler sur un mélange de sucre glace et de cacao en poudre, avec deux règles comme gabarit, pour avoir une épaisseur régulière. Il existe maintenant des rouleaux qui ont une surépaisseur qui évite d’utiliser ces règles.

chocolaterie toque blanche lyon

A l’aide de cadres comportant des fils métalliques (guitare), on découpe cette pâte à la taille voulue. On peut faire des rectangles, des carrés, ou aussi des losanges, en fonction de l’espacement ou de l’inclinaison de la guitare. Cet instrument artisanal permet de découper trois formes différentes. Une extrudeuse (cylindre) peut également faire ce travail en mode industriel.

pâte de chocolat

Il est temps de travailler la pâte d’amande, à l’aide d’un laminoir (deux rouleaux entraînées par un moteur électrique) qui va l’écraser à l’épaisseur désirée. Du sucre glace est bien utile pour que la pâte d’amande n’adhère pas au laminoir … surtout pas de farine, qui risquerait d’apporter de la fermentation !

chocolaterie la toque blanche lyon

chocolaterie la toque blanche lyon

Avec un rouleau, on va découper la pâte d’amandes en bandes régulières. On va pouvoir commencer le montage de nos bonbons. Les demi-toques, montées sur des charnières, sont d’abord saupoudrées d’un peu d’amidon de maïs afin que la pâte d’amande ne colle pas.  On y installe la bande de pâte d’amandes, puis les petits morceaux de ganache et du sirop parfumé au grand-marnier pour que tout cela se soude bien lorsqu’on va refermer le moule à charnières.

chocolaterie la toque blanche lyon

C’est un des produits les plus longs à fabriquer dans la gamme de chocolats de la chocolaterie. Il est fabriqué à la chaîne, trois personnes se répartissant les différentes étapes de fabrication, avec un résultat de 7 kilos de bonbons à l’heure ! (chaque bonbon pèse environ 10 g)

On presse bien sur les moules pour faire adhérer la pâte d’amandes. On les sort ensuite du moule … mais ce n’est pas terminé. Si on laisse les bonbons ainsi, ils vont très vite durcir. Il va donc falloir leur donner un petit bain, et pour cela préparer un sirop relativement épais de 50 kilos de sucre pour 23,5 litres d’eau. Avec un pèse-sirop on va mesurer sa densité (1300 Baumés), puis on le laisse refroidir à environ 26 degrés. Les toques sont alors plongées dans ce sirop pendant dix-sept heures, et se voir couvertes d’une jolie cristallisation de sucre, qui va à la fois protéger la toque blanche de la sécheresse et les rendre jolies et brillantes.

chocolaterie la toque blanche lyon

On les laisse égoutter une heure, puis une fois bien égouttées, on va les laisser sécher pendant une demi-journée, sur des grilles propres et sèches. Elles iront ensuite en magasin pour notre plus grand plaisir !

 

Les bonbons liqueur

fabrication bonbons liqueur

Dans un casier en bois, on tamise de l’amidon très sec, qui ne contient pas d’humidité, puis on lisse le dessus, en laissant un espace pour la deuxième étape de travail : avec des moules en plâtre qui sont collés sur une planchette, (bûchette, navette …) on va faire des empreintes dans l’amidon qui vont servir de moule (cela s’appelle « un couloir »). On prépare un sirop (eau et sucre) cuit précisément à 114°, auquel on a ajouté de l’alcool à minimum 50 degrés ; c’est ce mélange que l’on va verser dans les alvéoles, à l’aide d’une espèce d’entonnoir. C’est un travail fatigant, les bras en l’air pendant parfois une heure …

fabrication bonbons liqueur

S’en suit un phénomène de cristallisation qui dure environ 8 heures. On retamise de l’amidon dessus et ensuite il faut attendre 4 heures pour la première cristallisation. On va ensuite les retourner à l’aide d’un petit rateau rang par rang et attendre à nouveau 4 heures. La cristallisation du sirop terminée, on peut ôter les bonbons de leur lit d’amidon, les épousseter un peu (on peut utiliser un peu d’air comprimé, mais pas trop fort, pour qu’ils ne cassent pas !) et les enrober d’une fine couche de chocolat noir, et les emballer individuellement dans du papier aluminium. Nous avons ainsi dégusté ceux qui venaient d’être faits, à l’alcool de poire.

 

Les moulages

Denis nous rappelle les températures pour faire la mise au point du chocolat (bon, on avait un peu oublié) ; la machine fait le travail toute seule (capacité 28 à 45 kilos suivant les appareils).

Il existe des moules en polycarbonate, en fer étamé (cela se fait de moins en moins), ou les moules thermo-formés : ils sont moins chers mais plus fragiles. Les formes sont très variées, il en existe pour toutes les saisons également.

On prend le moule en forme de cabosse (qui doit être à température ambiante et non froid, sinon le chocolat va cristalliser trop vite) ; avec le pinceau, on va badigeonner généreusement de chocolat tout le fond du moule ; lorsque c’est fait, on pose le moule pour laisser le chocolat cristalliser un peu. Ne paniquez pas si de petits points blancs apparaissent sur votre chocolat : il ne s’agit pas de moisissures, mais d’une division des masses et le beurre de cacao qui ressort ; pour y remédier il faudra refaire une mise au point du chocolat, ou le refaire fondre. Une seule couche au pinceau c’est un peu insuffisant, donc on applique une deuxième couche, on tapote pour qu’il n’y ait pas de bulle d’air entre les deux couches.

moulage chocolat

Pour unir les deux faces, on racle le contour du moule pour enlever ce qui a un peu débordé, et que ça soit bien lisse ; on les stocke une vingtaine de minutes au réfrigérateur, pour pouvoir démouler le chocolat. Si la courbe de cristallisation a été bien respectée, on démoulera sans problème notre cabosse, car le chocolat va se rétracter au froid et donc se dégager facilement.

Après avoir fait chauffer légèrement une plaque métallique, on passe les moitiés dessus, il n’y a plus qu’à accoler les deux côtés.

moulage chocolat

Pour les chaussures, la décoration est faite au beurre de cacao teinté avec des colorants naturels, au pinceau. Les détails se font ensuite au cornet, également avec du beurre de cacao coloré.

Pour les chocolats individuels il existe beaucoup de façons de décorer grâce à des feuilles « transfert » qui, comme une décalcomanie, appliquent un motif à la surface du bonbon de chocolat. Cela est plus rapide et plus régulier qu’un décor à la main !

escarpin chocolat

Merci à Jacques et Denis pour leur accueil et leur démonstration très intéressante.

LA TOQUE BLANCHE
11 Rue d’Austerlitz
69004 LYON
Visites gratuites tous les premiers samedis du mois (durée une heure environ)
Réservation par téléphone au 04 72 07 90 52 (places limitées)

26 réponses sur « Dans la chocolaterie »

Ha oui en effet, ça devait être génial de découvrir les coulisses de toutes ces préparations !
J’ai beaucoup aimé en lire le récit en tout cas, j’ai appris plein de choses. Et d’ailleurs, je n’ai encore jamais goûté les toques blanches ! Va falloir y remédier. (:

c’est juste à côté de chez moi et je ne savais même pas qu’ils proposaient des visites gratuites, en plus j’ai acheté plusieurs fois du chocolat chez eux pour Pâques car je trouve le rapport qualité prix vraiment bien )

Wahou !
Je passe souvent rue d’Austerlitz (because la friperie Coco Picos, hum !) mais je ne m’étais jamais arrêté à cette chocolaterie… Prochaine fois, tu me donnes envie 😉

Très instructif comme article…pourvoir s’incruster chez les artisans comme une petite souris pour regarder leur savoir faire c’est un peu mon rêve. Merci de nous avoir fait partager cette expérience…qui me donne plein d’idées pour mes prochains chocolats maisons

Très beau reportage sur cette chocolaterie que j’adore, et quelle chance elle est dans ma rue. j’ai transmis cet article aux chocolatiers concernés 😉
Très belles photos également.

Voilà un article qui me ramène à 14 ans en arrière, quand j’y ai fait mon année d’apprentissage en chocolaterie là bas, avec Jacques et Denis ! Merci pour cet article et ces photos qui m’ont rappelé cette époque de ma vie… Bonne continuation !

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