« Un peu de sérieux » disait l’autre …. plusieurs fois, d’ailleurs … 😀 sénilité précoce ? Eh oui du sérieux il en faut c’est pourquoi j’ai mis un peu de temps à publier cet article, il en faut pour rédiger quelque chose de complet et de documenté !
Connaissez-vous le festival The Crystal Ship à Ostende, en Flandres ? C’est le plus grand festival de street art en Europe, avec plus de 50 fresques, mais également 250 petites interventions cachées dans les rues … des artistes belges et européens sont là bien sûr, mais également de grands noms internationaux, venus d’Argentine, des Etats-Unis ou d’Uruguay.
Cette année, j’ai eu la chance d’assister, grâce à l’invitation de Visit Flanders et Visit Ostende, à l’édition 2018 qui se déroulait les 7 et 8 avril dernier, et découvrir les œuvres monumentales de Telmo Miel, Sainer, Colectivo Licuado, Ben Slow, Matthew Dawn ou encore Dourone, dont les œuvres sont venues rejoindre les fresques de Strook, Fintan Magee, Zio Ziegler, Faith47, 1010, Axel Void, Phlegm, Roa, Pixel Pancho et j’en passe.
Difficile à croire que cette manifestation n’a que trois ans, et qu’en si peu de temps ce festival (grâce à son fondateur Bjørn Van Poucke ) a transformé la ville de Ostende en véritable musée du street art à ciel ouvert. La Flandre est devenue incontestablement, en quelques années, une véritable destination pour les passionnés d’art urbain ! Je vous avais déjà montré le street art à Gand , j’ai vu des photos des multiples fresques d’Anvers … ici je vous propose de voir quelques unes des fresques, de 2018, mais aussi de 2017 et 2016, rencontrées pendant mon séjour là-bas.
Dans le centre ville
C’est dans les bureaux de l’office du tourisme d’Ostende (photo ci-dessous) que je retrouve Bjørn, qui m’explique en préambule l’histoire de ce portrait en bois qu’on peut voir sur l’immeuble. Elle raconte en effet un histoire … son auteur, le belge Stefan De Croock alias Strook , a souhaité utiliser, comme il le fait d’habitude, de vieilles planches de bois, aussi les habitants ont fourni cette matière première, et on retrouve même parmi les panneaux utilisés des morceaux du navire Mercator, mais aussi d’un bateau de pêche qui a fait naufrage, l’ « Assanat », (deux pêcheurs à bord avaient perdu la vie).
Nous discutons tout en explorant les rues aux alentours. Bjørn me confie qu’il organise des évènements artistiques depuis l’âge de 17 ans (!). Du haut de ses 37 ans (qu’il ne fait pas du tout) on peut dire qu’il a maintenant une très grande expérience en ce qui concerne la mise en place de projets artistiques. Amateur d’art depuis toujours, et après son premier festival urbain en 2010, il reçoit une invitation de la ville d’Ostende, et créée ce concept, dont il a trouvé le nom en s’inspirant de la fameuse chanson des Doors (vidéo YouTube ici : https://www.youtube.com/watch?v=bU1sLx1tjPY )
Il m’explique également que les habitants d’Ostende sont engagés à 200% dans le festival, proposent les murs de leurs façades, et participent au succès de celui-ci, qui attire plus de 70 000 visiteurs par an ! En effet si les artistes ne sont là que quelques jours pour réaliser leurs oeuvres, celles-ci restent ensuite de façon permanente sur les murs (sauf destruction d’un bâtiment bien sûr, ce qui peut arriver), aussi on peut venir toute l’année les voir. Tous les artistes sont rémunérés pour les oeuvres qu’ils réalisent, c’est important de le souligner.
Bjørn a aussi une autre casquette, peut-être moins connue : il est le fondateur de Street Art Belgium , une association aux multiples facettes, une communauté en ligne qui se charge de promouvoir l’art urbain en Belgique, elle fait partie de l’associatiion The Crystal Ship.
Bjørn est également auteur, il a co-signé le livre Street art / Today avec Elise Luong. Cet ouvrage présente les cinquante plus grands noms du street art actuel paru aux Editions Gallimard dans la collection Arts urbains – Alternatives (il y a même une traduction en français) Clic par ici le lien amazon (non affilié) : https://www.amazon.fr/Street-art-today-grands-street/dp/2070197573
Ci-dessous : à gauche, auteur Manyoly , à droite B. Van Poucke.
Pas très loin du restaurant Belle de Jour (avez-vous lu mon article sur Ostende gourmande ?) , Dourone a peint ce grand portrait (« OPIA ») sur une façade, pas très facile pour Fabio Lopez Gonzalo, en raison du relief des ouvertures en creux … mais il s’en est très bien sorti ! On reconnaîtra sa muse Elodie, sa partenaire de vie et de travail. A voir sur Christinastraat.
Sur le quai Vissers, au début d’une rue perpendiculaire, sur une des façades de l’hôtel Rubens, on remarquera cette oeuvre très originale (ci-dessous à gauche) de Gaia. Vous l’aurez compris, cet énorme gilet de sauvetage orange rempli de fleurs est bien sûr un hommage aux migrants, un sujet qu’on retrouve à d’autres reprises cette année. Gaia a grandi à New York et a la particularité d’être non seulement artiste mais aussi organisateur d’un festival de street art, à Baltimore aux Etats-Unis (« Open Walls« ). Le collage à droite est du collectif Outings Project, une initiative du français Julien de Casablanca, qui sort des oeuvres d’art historiques de leur contexte en les plaçant dans un lieu public. Une belle façon de faire disparaître les frontières entre l’art des musées et l’art des rues, et rendre accessible celles-ci. En l’occurence à Ostende on retrouve des oeuvres classiques belges, (qu’il trouve dans une banque d’images digitales).
Non ce n’est pas un montage photoshop, vous voyez bien un carré dans un cercle dans un triangle ! Cette anamorphose de Elian Chali (Argentine) est surprenante, (si vous changez de position sur la place en face de cette maison, les formes changeront de proportions, c’est bluffant !). Si vous vous rappelez mon article sur 2km3 à Saint-Gervais … l’un des étages du parkings étaient relookés par lui !
On ne le présente plus, je suis sûre que vous avez reconnu son style dès le premier coup d’oeil …. il est gantois et il était là pour la version 2016 du festival, il s’agit bien sûr de Roa avec une immense fresque de rongeurs entassés les uns sur les autres, du plus grand en bas au plus petit en haut ! Je n’en revenais pas quand Bjørn m’a dit qu’il l’avait peinte en seulement deux jours !
Sur les murs du Ostend Hotel, ce portrait de couple occupe toute une façade latérale. Ben Slow aime peindre des portraits de locaux, et voulait cette fois-ci peindre des gens très amoureux mais depuis longtemps ! Ce sont en fait les parents d’un des membres de l’équipe organisatrice qui se sont fait photographier, et l’artiste a travaillé d’après ce cliché. Vous avez peut-être déjà vu les portraits en noir et blanc de cet artiste qui vit et travaille à Londres.
A gauche ci-dessous, un immense portrait de l’argentin Bosoletti. Comme vous le remarquez peut-être, j’ai converti ma photo en négatif, pour voir correctement cette reproduction d’un cliché historique, puisée dans le musée de la ville d’Ostende, qui date du temps de l’apparition du bikini. A droite ce joli bouquet est de Pastel ,(lui aussi argentin), artiste également architecte, qui aime orner de savants bouquets les façades, comme ici à l’angle de Nieuwstraat et Schipperstraat. Si vous avez le temps regardez son site, il peint vraiment des oeuvres fantastiques, un peu partout dans le monde.
Le portoricain Alexis Diaz a fait ce dessin (trois longues journées de travail, au pinceau s’il vous plaît !) à l’emplacement d’un magasin qui est pour l’instant fermé. Situé sur la rue piétonne Kapellestraat, le panneau en bois sera ensuite déplacé pour trouver sa place dans un espace dédié à l’art, à Gand. J’adore son trait fin et précis ! Vous avez sans doute vu ses créatures fantasmagoriques mi poulpe mi éléphant, à Londres ou à Miami Wynwood.
Pas très loin du navire-musée Mercator : (à gauche, le duo d’artistes belges Jeps & Jucte , qui ont voulu rendre hommage à la scène musicale ayant des liens avec Ostende : Arno, Marvin Gaye, Johannes Verschaeve et Lucy Loes. A droite, style tout à fait différent pour Hell’O Collective, un collectif d’artistes belges (Jérôme Meynen et Antoine Detaille) qui peignent souvent avec des couleurs vives, un univers de personnages imaginaires qui puise souvent ses sources dans l’icônographie médiévale.
A quelques dizaines de mètres de là, face à la gare routière, le portrait d’un Ostendais noir s’étale sur les murs de l’école De Avoond. C’est l’oeuvre de Nicolás Romero Escalada, plus connu sous le nom de Eversiempre. Elle nous rappelle les heures sombres de la colonisation du Congo par le roi Leopold II (industrie du caoutchouc).
Un peu plus au sud de la ville
J’ai loué un vélo pour faire le parcours car les oeuvres sont assez éloignées les unes des autres … je ne suis pas trop fan du grand texte écrit blanc sur fond noir de Robert Montgomery, un poème à propos de la crise écologique. Je préfère le portrait mystérieux de Henrik Uldalen (Norvège) qui est l’un des artistes présentés par le festival NuArt.
ci-dessous Sigfried Vynck (2016) un poisson dans un style réaliste et coloré, sur le côté de cette maisonnette.
Plus de maison mais cette fois-ci de grands immeubles d’appartements, style HLM, l’un d’eux réhaussé par cette immense oeuvre de Fintan Magee (Australie). Habitué des dessins monumentaux (celle-ci fait 40 mètres de haut), il a choisi pour celle-ci de faire le portrait de la musicienne Ostendaise Laura Maes.
Ci-dessous à droite, dans le même quartier, une autre barre d’immeuble arbore un immense portrait peint par Ricky Lee Gordon en 2017. Il est très particulier car comme vous le voyez la partie supérieure du visage est remplacée par des vagues. Une phrase s’y trouve également, faisant référence à Gautama Buddha : « Throw a drop of water into the sea to prevent it from drying up« . Je crois que c’est le seul artiste d’Afrique du Sud qui a peint à Ostende.
A gauche, une de mes fresques favorites, de taille moyenne. C’est le duo Telmo & miel (Telmo Pieper et miel Krutzmann) qui viennent des Pays-Bas, qui l’ont peinte sur Nieuwpoortsesteenweg. J’adore le petit paresseux caché sous le parapluie …. et surtout l’harmonie des couleurs utilisées. Là aussi, je vous recommande un petit clic sur leur nom en gras pour découvrir d’autres oeuvres de ces artistes !
Toujours à vélo, je progresse sur le parcours, à l’aide de l’application mais aussi d’un plan papier. Le grand personnage peint en noir a l’air un peu à l’étroit sur cette façade de maison ; on ne le voit peut-être pas bien sur ma photo, mais le dessin est plein de petits détails, sur le corps entier. Zio Ziegler s’inspire à la fois de l’art de la Renaissance, du Moyen-Age, mais aussi de l’art tribal, africain. Il a dû tenir compte du relief des fenêtres en arrière-plan, pas facile !
A gauche ci-dessous, Franco Fasoli (aka JAZ) a été fortement inspiré par le peintre ostendais James Ensor pour cette fresque fantasmagorique ! – A droite, Wasp Elder signe pour cette année 2018 une très jolie peinture (pas si facile à trouver car toute la zone était en travaux et la route défoncée) . Ces personnages historiques saisis en pleine dégustation attiraient pas mal de monde néanmoins. J’aime beaucoup son style, on dirait parfois un collage si on regarde l’oeuvre de loin.
Un peu plus au nord et est de la ville
Juste avant de reprendre mon train et en compagnie de Mélissa, auteure du blog Mel loves travel j’ai pris le petit ferry gratuit pour aller sur la rive Est et m’extasier devant cette immense fresque de Phlegm, un artiste que j’adore et qui nous vient de Sheffield au Royaume-Uni. Je suis toujours fascinée par ses personnages imaginaires, au regard si triste.
Un peu plus loin se trouve un portrait imposant de l’australien Guido van Helten. Ce personnage est un pêcheur d’Ostende qui s’appelle Norbert De Smit. Le dessin s’étale à la fois sur un immeuble et des espèces de silos, une belle prouesse pour l’artiste ! Vous vous rappelez peut-être que l’une de ses gigantesques oeuvres se trouvait également à Helsinki => clic là street art à Helsinki
A voir aussi
En marge du festival et à une échelle parfois (bien) plus réduite, il faut ouvrir l’oeil parfois pour dénicher les oeuvres des invités qui ont disséminé des petites pépites un peu partout :
Je ne connaissais pas très bien l’artiste JAUNE … il a été éboueur provisoirement et visiblement cela l’a marqué … on retrouve ces petits hommes jaunes faits au pochoir. Ce belge de Bruxelles exerce bien sûr davantage dans son propre pays qu’en France, mais on en trouve un peu ailleurs aussi. C’est un travail très humoristique et surtout qui exploite totalement l’environnement immédiat, qui fait le charme de ces petites créatures attachantes. En fait en regardant le compte instagram de Jaune, je me rends compte qu’il y en a plein que je n’ai pas vu …. tristesse !
Christian Guémy (C215) a réalisé de beaux dessins au pochoir à plusieurs endroits de la ville, je ne les ai pas tous vus mais ceux que j’ai pu trouver étaient superbes ! Vous préférez le fond bleu ou le fond vert ?
Plein d’humour décalé, les dessins de OAK OAK , toujours là où on ne les attend pas !
Voilà un autre artiste dont les oeuvres peuvent hélas vous échapper : celles de l’artiste plasticien Isaac Cordal . Venu de Galice en Espagne, il place ces petits personnages très en hauteur, en train de téléphoner ou de lire le journal … il y a toujours un message critique de notre société au-delà du burlesque de la scène. J’aurais dû prendre mes jumelles peut-être ! Il me semble avoir vu ses petits bonhommes à Grenoble, rue du Phalanstère (et pour sûr au 13 de la rue des Bergers). Il y a exposé aussi, mais en galerie.
J’espère que cet article vous a plu et vous a donné envie d’explorer l’art urbain de la ville d’Ostende. Qui sait sur le blog je vous parlerai peut-être prochainement du street art d’Anvers, qui n’a rien à lui envier !
THE CRYSTAL SHIP
Site Web : http://www.thecrystalship.org/site/fr/
VISIT FLANDERS
Site Web : http://www.visitflanders.com/fr/
VISIT OOSTENDE
Site Web : https://www.visitoostende.be/fr
9 réponses sur « Crystal Ship Ostende »
bel article très complet … tu as dû adorer te balader dans toutes ces fresques ! je note pour l’année prochaine …
De chouettes nouvelles découvertes et de superbes fresques (ça fait plaisir de voir combien les fresques sont toujours plus détaillées et recherchées <3)
oui j’en ai pris plein les yeux !
Je craque pour ces C215 !!! superbes !!
Un très bon article ! merci du partage
Hello ! J’ai déjà fait le parcours en centre ville et je voulais faire le parcours complet à vélo. Je n’aime pas rouler en ville. Du coup je me demandais, est ce que le parcours vélo qui est indiqué sur la carte est sur des pistes cyclables ou route ou mélange ?
bonjour Arlette ! mon voyage remonte à pas mal de temps donc j’avoue que je n’en suis plus très sûre … questionne peut-être l’office du tourisme d’Ostende sur le sujet ? C’est vrai qu’en centre ville je pense que c’est plus simple de faire à pied, et en périphérie faire à vélo ..
[…] Telmo Miel ne m’est pas étranger, forcément ! Ils ont participé entre autres au festival The Crystal Ship à Ostende, et peignent ensemble depuis 2012. Venez au Locle en Suisse et vous verrez aussi un très beau mur […]
[…] derniers ajouts au Locle. Très populaire, ce tandem est demandé partout dans le monde, comme à Ostende, Boulogne sur Mer, en Suède, en Allemagne […]