Street art Lodz

Comme à chaque voyage, je ne résiste pas au plaisir d’explorer la scène street art locale ; on peut dire qu’à Lodz j’étais particulièrement gâtée car comme je vous l’ai déjà montré c’est une ville de culture, que ce soit dans le domaine du cinéma, de la bande dessinée … mais aussi de l’art urbain !

J’ai feuilleté quelques guides voyages connus, et nulle part, dans le chapitre consacré à Lodz, je n’ai vu de mention des fresques murales, pourtant omniprésentes !!!! C’est incroyable, les rédacteurs sont-ils aveugles ? ☺️ Il y a pourtant plus de 230 oeuvres dans la ville, dont la majorité est dans le centre. Des artistes polonais, mais aussi venus du monde entier, pour réaliser des fresques monumentales.

La fondation URBAN FORMS qui existait déjà depuis plusieurs années s’est concrétisé avec un festival de grande envergure qui s’est déroulé pendant l’été 2018, mais l’une des premières fresques murales a été réalisée ici en 2001 par un groupe d’artistes de Lodz, Futura, et à l’époque c’était la plus grande en Europe. La responsable de cette organisation, Teresa Latuszewska-Syrda, préfère parler plutôt d’un musée à ciel ouvert quand on évoque ce projet, et sa mission est bien plus large que ce qu’on peut penser. Urban Forms souhaite en effet ce concentrer sur la promotion de la culture « live » auprès du public, la promotion et le soutien d’initiatives artistiques, sportives et sociales, donnant aussi une valeur artistique inédite à la ville de Lodz. Ils ont également publié plusieurs livres, disponibles en format pdf : “Street Art Decade. Urban Forms Gallery 2009-2019” par W. Kazimierska-Jerzyk et T. Latuszewska-Syrda, ainsi que « Experiencing art in urban space » par A. Gralińska-Toborek et W. Kazimierska-Jerzyk.

Les oeuvres mises en avant dans cet article ne sont qu’un tout petit aperçu de ce que vous pourrez voir, je ne vous cache pas que ce sont mes préférées, en toute subjectivité ! Je les ai classées en fonction de leur situation, mais le mieux est de se laisser porter au gré du hasard de vos pas …

Au nord

Peeta nous subjugue toujours avec ses oeuvres où le relief est si bien créé, en trompe-l’oeil, autour de la calligraphie … on a eu la chance de l’accueillir récemment à Boulogne-sur-Mer, en France ! Cet italien qui vit à Venise appartient aux crews EAD, un collectif d’artistes de Padoue.

Je connaissais déjà le travail de Dede Bandaid pour avoir vu ses dessins à Tel Aviv dans le quartier Florentin il y a quelques années, et j’étais ravie de revoir ses pansements, assez rares en Europe. Par contre, Stormie Mills était pour moi un inconnu et ces deux petits personnages tristes s’étreignant étaient vraiment très touchants … cet artiste australien utilise une palette restreinte : du noir, du blanc, du gris, de l’argent. Pour la petite histoire, si vous séjournez à Melbourne, vous aurez peut-être l’opportunité de séjourner dans la suite qu’il a peinte dans l’hôtel The Cullen ?

Dans le centre

Une de mes fresques préférées dans cette zone centrale est sans conteste celle de Roa, qui a dessiné ici un groupe d’écureuils en train de voler des oeufs, sur le pignon d’un immeuble. J’espère qu’une nouvelle construction n’occultera pas cette belle pièce, comme vous le voyez on ne peut accéder au terrain, en raison d’une barricade. L’artiste belge originaire de Gand aime peindre ce type d’art animalier, souvent en noir et blanc, comme j’ai pu le voir à Dubaï ou à Odense.

Ce portrait de Rubinstein vous dit peut-être quelque chose, car on le retrouve sur de nombreux supports touristiques de la ville ; il est peint par l’artiste brésilien Kobra, mondialement connu. Il est difficile de nommer un pays où il n’a pas peint de murs ! Il reprend une photo du pianiste faisant une grimace, avec en fond, à gauche, ses triangles de couleur et à droite un clavier dont certaines touches sont également colorées.

Le passage de la rose attire beaucoup de monde car c’est effectivement un habillage des murs très particulier, que je n’avais jamais vu auparavant. C’est l’artiste Joanna Rajkowska qui a réalisé cette mise en beauté impressionnante des murs extérieurs de plusieurs maisons, en hommage à sa fille malade qui se prénomme Rosa. En effet, celle-ci souffrait d’une lésion sur la rétine, et regarder tous ces morceaux de miroirs force notre oeil à reconstituer parfois une image entière à partir de petits morceaux, comme ce fut le cas de Rosa pour la reconstruction de sa vision après une chimiothérapie.

Dans l’ancienne usine devenu pôle commercial La Manufaktura, j’ai longtemps cherché ce petit morceau de dentelle dans un mur de restaurant … il était bien caché ! C’est l’artiste NeSpoon qui l’a installé ici en 2019, et il y est toujours, je suis certaine que personne ne sait qu’il est là … Cette muraliste fan de broderie s’adonne aussi à la céramique et c’est l’un des rares exemplaires que j’ai pu voir, depuis le temps que je la suis dans mes voyages à travers le monde. Si vous ouvrez l’oeil au niveau du passage de la Rose, vous verrez aussi une oeuvre de l’artiste, mais elle est hélas cachée par un ensemble bois et métal, c’est fort dommage.

Sur le même site, une grande fresque toute en longueur domine l’entrée du centre commercial, réalisée par Mikolaj REJS, intitulée « Intergalatic ». Il s’agit d’un paysage très joyeux où des personnages, y compris un chat sont représentés. Il est actif dans le domaine du street art depuis la fin des années 1990 et s’implique également dans les fonctions d’éducation artistique et sociale. Il a animé des ateliers pour un projet polono-ukrainien-moldovien ArtDrome. Ses oeuvres peuvent être trouvées, entre autres au Musée d’Art Contemporain de Cracovie.

En vous dirigeant vers le sud, non loin de Piotrkowska, vous verrez cette collaboration remarquable entre les brésiliens jumeaux OsGêmeos (Otavio et Gustavo Pandolfo) et Aryz, qui affiche elle aussi pas mal d’années au compteur … plus de dix ans puisqu’elle a été peinte en septembre 2012 pour le festival Urban Forms. Leurs styles sont très différents mais l’oeuvre n’en est que plus intéressante.

Au sud

Comme au nord, on trouve Aryz et Sainer assez proches l’un de l’autre. L’immense fresque verticale de Sainer (Etam Cru) est particulièrement poétique, elle représente le printemps, avec cette femme de profil qui a un perchoir sur son chignon, et un oiseau posé sur son index.

Très ancienne, ce dessin de Aryz intitulé « la lettre d’amour », fait encore son effet, et la petite cahutte a été repeinte dans les mêmes tons de rose pâle. (elle était là avant la réalisation de la fresque, ce que j’ignorais) Les couleurs de celle-ci se sont beaucoup estompées, normal, elle date de 2011 …

J’ai beaucoup aimé cette mise en scène de plusieurs peluches, plus récente, et peinte en 2020 pour une bonne cause, par Wojciech Brewka. Celui-ci est le co-fondateur de la galerie Officyna Art&Design, et de l’association Propaganda Sztuki. Il dédie cette oeuvre à la petite Maja Kwiatkowska, atteinte de SMA (une atrophie de la moelle épinière). La campagne consiste à participer via un QR code placé en bas de la fresque, pour faire des dons couvrant le traitement de la fillette.

Bien plus au sud, sur la même maison, deux fresques se partagent la vedette, chacune d’un côté : la nature morte représentant un bouquet de fleurs fanées de l’espagnol Aryz (on le retrouve un peu plus bas dans cet article). Vous savez peut-être qu’il a peint récemment une fresque à Clermont-Ferrand ? et de l’autre côté, cette « Madame Chicken », le portrait d’une vieille femme de profil, fichu sur la tête, qui tient un coq dans ses bras, par ETAM Cru (le tandem formé par Przemek Blejzyk aka Sainer et Mateusz Gapski aka Bezt ; ils se sont rencontrés très jeunes sur les bancs de l’école. Je vous avais montré une fresque de Sainer vue à Gdynia, il y a quelques mois (près de Gdansk). Ces deux fresques se trouvent sur l’immense avenue Politechniki, à la hauteur de la Biala Fabryka (l’usine blanche de Ludwik Geyer dont je vous ai montré dans mon article « Lodz côté culture« , où se trouve le musée central des textiles).

A l’Est

Dans cette partie, plusieurs fresques se trouvent sur la rue Pomorska, vous ne perdrez ainsi pas de temps et pourrez en voir plusieurs en même temps ; vous pourrez voir ainsi DALeast, Borondo, Aryz, Awer … à côté les uns des autres. Commençons donc par DALeast et cette vague tout en délicatesse, qui change des oiseaux ou rapaces qu’il peint souvent.

J’ai flashé sur cette oeuvre 3D par AweR, un artiste italien que je ne connaissais pas … hélas je n’avais pas de lunettes 3D sur moi, pour profiter pleinement de l’effet ! « Anatomy of funny moments » se trouve sur Pomorska 93. Cet artiste est né à Polignano a mare, dans les Pouilles mais il vit maintenant à Berlin. Son art psychédélique est fascinant, il utilise également l’informatique pour créer ses paracosmes, mondes imaginaires colorés. Sans surprise, il est également tatoueur et graphic designer.

Située tout près de Off Piotrkowska, une ancienne usine réhabilitée en bars, restaurants et commerces, la fresque de Jakub Rebelka est vraiment monumentale, sur le bloc d’appartements Manhattan. Vous l’avez reconnu, il représente le héros du livre et jeu vidéo « The Witcher » (Geralt of Rivia) ! Sur 26 étages, et couvrant pas moins de 2000 m², il atteint 78 mètres de haut, ce qui en fait je crois l’oeuvre la plus grande du pays ; elle fut dévoilée en octobre 2021 à tous les fans …

On ne s’arrête pas là, puisqu’un de mes artistes préférés, Okuda, a choisi de peindre sur une résidence étudiante, et ça la transforme complètement ! Ne manquez pas sa Mona Lisa dans le 13e arrondissement de Paris ! La succession de fenêtres au centre se transforme en gigantesque arbre perchoir, où des oiseaux sont posés. Il est vraiment magnifique, mais la peinture commence à s’écailler un peu, il date de 2018, à l’occasion du 20e anniversaire du programme Erasmus.

A l’Ouest

C’est en 2014, pour la quatrième édition du Urban Forms Gallery Festival, qu’Alexandre Farto, aka VHILS, que vous connaissez sûrement déjà, a créé cette oeuvre sur un mur bien gris ! À l’aide de perceuses, burin, marteau, il creuse dans la surface, découvrant la partie originale du mur, pour faire apparaître le portrait d’une femme de profil, mêlée aux branches d’un arbre, quelque peu fantomatique.

on ne s’arrête pas là, en commençant par ce superbe cerf du chinois DALeast dont j’avais déjà vu un superbe aigle à Varsovie, dans le quartier Praga. Le corps de l’animal devient un nichoir pour des oiseaux qui prennent leur envol au dessus de ses cornes … magnifique, mais difficile à prendre en photo sans voitures garées sur le parking !

Plus loin, je retrouve le chilien INTI qui représente une poupée andine (si vous avez le temps, il y en a un autre encore plus à l’ouest, de taille plus conséquente (Wyszyńskiego 80), ainsi que l’enfant du pays Meisal Lasiem aka Meisal461, qui a participé à la toute première fresque de Lodz dont je vous parlais au début de mon article (à droite ci-dessous). Cette fresque « Kobieta Adlera » a été réalisée dans le cadre du projet OFF GALERIA en 2015, ce qui explique qu’elle soit un peu abimée avec le temps …

Si vous souhaitez vous aussi découvrir ces fresques, vous pouvez retrouver un plan du street art à Lodz en ligne.

Cet article fait suite à une invitation de l’Office National Polonais de Tourisme et de la ville de Lodz, mais je garde toute liberté éditoriale.

Office National Polonais de Tourisme
Site Web : https://www.pologne.travel/fr

Lodz Travel
Site Web : https://lodz.travel/fr/